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mercredi 2 avril 2014

Préface à "Pour un vocabulaire de la spatialité japonaise" / A. Berque

Couple with a Standing Screen K. Utamaro
Couple with a Standing Screen (1797 ) K. Utamaro
Museum of Fine Arts, Boston
(source)
Préface à Pour un vocabulaire de la spatialité japonaise 
(dir. P. Bonnin)

par Augustin Berque

            Si la spatialité nippone fascine en Occident, c’est d’abord dans les milieux de l’architecture, comme il se doit puisque ce sont les architectes qui s’occupent de mettre l’espace en formes concrètes. On ne s’étonnera donc pas que ce soit un architecte, Philippe Bonnin, qui ait entrepris de réaliser un Vocabulaire de la spatialité japonaise. Mais pour cet architecte qui est aussi anthropologue, il ne pouvait s’agir seulement d’un dictionnaire de l’architecture japonaise. L’entreprise va bien au delà, car elle part d’une interrogation anthropologique sur ce que c’est concrètement que l’espace dans la culture nippone. Certes, on peut se poser une pareille question à propos de toutes les cultures humaines ; mais il y avait dans le cas du Japon des raisons plus pressantes de le faire. D’où l’intérêt tout particulier de ce Vocabulaire, qui réussit l’exploit d’y apporter une réponse coordonnant une approche pluridisciplinaire, ayant mobilisé pendant plusieurs années des dizaines de chercheurs venus de champs divers.

mercredi 24 octobre 2012

Vivre en lisière / P. Bonnin



De ma fenêtre: les collines vers l'ouest  et la nappe urbaine qui vient buter contre
De ma fenêtre: les collines vers l'ouest
 et la nappe urbaine qui vient buter contre ((cc) Philippe Bonnin)

Vivre en lisière

Les effets de lisière

par Philippe BONNIN


Ce sont en fait les bruits de la ville au petit matin, par la fenêtre ouverte, dans le calme de l’aube, qui m’ont fait prendre conscience que rien de ce qui était sensible ici n’échappait aux effets de lisière du lieu. Une topologie urbaine vivante et vécue en quelque sorte.
L’institut où je me trouve depuis bientôt trois mois, et son campus dans lequel j’habite, se trouvent placés tout en lisière de la ville, au sud-ouest, derrière le nouveau site de l’université de Kyoto et son « innovation park » イノベションパーク (à la lisière de la connaissance ?), sur un replat pas encore trop pentu, au pied 山麓 (sanroku ou yama no fumoto) des collines, juste à cet emplacement traditionnel des villages japonais (pour ne pas empiéter sur les surfaces des rizières, profiter des sources et exploiter l’orée des bois, satoyama 里山).

mercredi 23 mai 2012

La spatialité nipponne à l'index / A. Berque

Mont Fuji Yokoyama Taikan
Mt. Fuji, YOKOYAMA Taikan, 1930.
(source : Ishibashi Museum of Art)
Japarchi – Vocabulaire de la spatialité japonaise (dirigé par Philippe Bonnin)

Ma, oku, seken, ta, wabi/sabi 

par Augustin Berque
 
Présentation : Augustin Berque introduit et définit cinq notions - qui sont aussi des esthétiques - propres à la spatialité nipponne. Il tisse ensemble un "entrelien humain" (voir "ma") entre l'univers de la science et le monde des phénomènes.
Ce "tissage", qui fonde notre milieu, 
  1. se déploie dans le rhizome des relations d'un vivant (voir "seken") - on pourrait dire au sens moderne, son "réseau".
  2. s'invagine dans le revers d'un endroit dont la profondeur (voir "oku") est chargée d'intimité et de force de résurgence.
  3. se mesure en conservant un rapport de proportion humaine, à l'échelle des tatamis, ou des rizières (voir "ta, tanbo") et non pas au moyen d'un pas absolutisé selon une métrique mathématique.
  4. il se transforme au cours du temps non pas selon une pente irréversible de dégradation, mais selon une esthétique et une morale (voir "wabi/sabi") qui se révèle progressivement par de la patine et le "goût de la solitude tranquille, loin des soucis du monde".
Au travers de ces 5 notions de la spatialité nippone c'est aussi une proposition de prédication renouvelée, apte à traduire en mots un milieu humain qui échappe toujours - d'une manière ou d'une autre - à toute langue. 
Toute traduction est au "bout de la langue", à l'extrémité de la bouche, en ce point d'inflexion entre le corps animal et le champ symbolique d'une culture donnée. Elle est donc aussi, de manière plus fondamentale, l'expression de l'umwelt de l'humain, du rapport au monde de l'homme en tant qu'espèce. À la lecture de ces "notices", au-delà des différences prédicatives entre milieu francophone et japonophone, c'est bien le sentiment d'une résonance commune qui se fait jour. Cela ouvre la perspective d'une relation médiale, où ce qui gît sur le bout de toutes les langues trouve corde à son arc (vocal) dans un ancrage organique commun. Ces mots-notions permettent d'articuler des vides médiants de la langue française, des absences sémantiques, conceptuelles, spatiales et temporelles. Ils sont de véritables outils pour penser, depuis le monde francophone et au moyen de la langue nippone, la mésologique de l'humain, sa manière propre - en tant qu'espèce - d'habiter et d'être humain sur la terre.
Bonne lecture, Y. Moreau.
 

mercredi 25 janvier 2012

Donner lieu au monde / A. Berque

V. Van Gogh, Le semeur au soleil couchant, 1888
(Source : Rijksmuseum Krueller-Mueller, Otterlo)

Donner lieu au monde : la poétique de l'habiter

Actes du colloque de Cerisy-la-Salle

Augustin Berque, Alessia de Biase, Philippe Bonnin (dir.)

Suite à L’Habiter dans sa poétique première, ce livre recueille les actes du colloque tenu en septembre 2009 à Cerisy-la-Salle. Il s’agit à présent de la création, c’est-à-dire de la poïétique d’un monde autre que l’insoutenable monde actuel. Insoutenable, notre monde l’est puisque non viable écologiquement, injustifiable moralement (car de plus en plus inégalitaire), et inacceptable esthétiquement (car il « tue le paysage »). Dans la réarticulation cosmologique du Vrai (ici l’adéquation de notre mode de vie aux capacités de la Terre), du Bien et du Beau, les auteurs ont donc été invités à imaginer un nouveau poème du monde, au delà de la modernité qui l’a fait taire en disjoignant les champs respectifs de la technoscience, de l’éthique et de l’esthétique.