mercredi 18 février 2015

Cosmophanie, paysage et haïku / A. Berque

Shirakawagô 白川郷
Shirakawagô (source)
Proposé à Projets de paysage, n° 12, « Paysage et culture »

Cosmophanie, paysage et haïku

par Augustin BERQUE

Résumé – Comme en témoigne entre autres le kigo (mot de saison) « premier paysage » (hatsugeshiki), le paysage tient une place notoire dans la thématique du haïku. On en analyse quelques exemples, non d’un point de vue littéraire mais dans le but de définir en quoi le haïku et le paysage participent d’une cosmophanie (l’apparaître-monde d’un certain environnement). Comme toute cosmophanie, celle-ci exprime un agencement ordonné (un kosmos) des valeurs fondamentales d’une certaine culture, embrayant celle-ci à un certain environnement naturel pour en faire le milieu spécifique de cette culture, donc celui qui entre tous lui convient le mieux.
Mots clefs : ENVIRONNEMENT, HAÏKU, MILIEU, MONDE, PAYSAGE.

mercredi 11 février 2015

Recension / A. Berque

The Great Day of His Wrath John Martin
(source)

Vous avez dit « naturel » ?


Virginie DUVAT et Alexandre MAGNAN
Paris, Le Pommier, 2014, 312 p., 23€ 

S’il est des géographes qui nous assurent que Le ciel ne va pas nous tomber sur la tête[1], ou au contraire des prospectivistes qui nous décrivent déjà L’effondrement de la civilisation occidentale[2] (rétrospectivement, vu de 2393), on creuse ici les interrelations qui « fabriquent des catastrophes » à partir de simples événements naturels. Le thème est géographique entre tous, et l’idée n’est pas neuve. On sait qu’il y a catastrophe quand l’humain est concerné, mais pas quand il ne l’est pas. C’est cette logique que le livre de V. Duvat et A. Magnan développe et affine, en passant en revue au fil des chapitres près d’une dizaine de cas qui nous mènent du Bangla-Desh aux îles coralliennes du Pacifique, en passant par la tempête Xynthia, l’ouragan Katrina, le cyclone Luis à Saint-Martin, le tsunami du « 3.1.1 » (i.e. le 11 mars) au Japon, et la résilience des Maldives après le tsunami de 2004. 

mercredi 4 février 2015

Pouvons-nous dépasser l'espace foutoir (junkspace) de la Basse Modernité ? / A. Berque

Kunsthal Rotterdam Rem Koolhaas
Kunsthal Rotterdam, Rem Koolhaas (source)
École supérieure d’art et de design d’Orléans
– Conférence, 7 janvier 2015 –

Pouvons-nous dépasser l’espace foutoir (junkspace)
de la Basse Modernité ?

par Augustin BERQUE

Résumé - Partant d'une citation de Rem Koolhaas, "The cosmetic is the new cosmic", on s'interroge d'abord sur la notion de cosmicité, qui s'exprimait dans toutes les cultures traditionnelles, notamment par l'architecture. En rapprochant cette cosmicité de ce qu'Uexküll a mis en évidence avec la notion d'Umwelt, on montre que cette expression, qui intègre les trois valeurs humaines fondamentales (le Bien, le Beau, le Vrai) en un tout cohérent, répond à une nécessité ontologique qui s'enracine dans le monde vivant. Puis on montre que le dualisme moderne a dissocié ces valeurs, aboutissant ainsi à l'acosmie, contraire de la cosmicité. L'espace foutoir (junkspace) prôné en tout cynisme par un Rem Koolhaas en est un exemple paradigmatique. Pour surmonter cette acosmie, les recettes architecturales ne suffiront pas ; c'est d'une révolution ontologique et logique que nous avons besoin, rétablissant le lien, par delà le dualisme moderne, entre la physique, la biologie et les valeurs humaines, comme y invite la mésologie nouvelle, dérivée de l'Umweltlehre d'Uexküll et du fûdoron de Watsuji[1].