mercredi 31 janvier 2018

Chaînes sémiologiques et production de la réalité / Augustin Berque

Café in Mytilene (Spyros Papaloukas, 1929)
source
Congrès de l’Association française de sémiotique / Greimas aujourd’hui : l’avenir de la structure / UNESCO, Paris, 30 mai – 2 juin 2017

Chaînes sémiologiques et production de la réalité

par Augustin Berque

Résumé – La notion barthésienne de « chaîne sémiologique » est ici rapprochée de la notion mésologique de chaîne trajective, et corrélativement de la notion de mitate 見立て (voir un lieu a en tant que lieu b) et de la « logique du lieu » (dite également « logique du prédicat ») de Nishida. Dans cette optique, la réalité se définira comme la trajection (par les sens, l'action, la pensée, le langage) de S en tant que P, soit la formule r = S/P, ce qui permet la synthèse entre logique de l'identité du sujet (Aristote) et logique de l'identité du prédicat (Nishida). La notion de chaîne trajective, soit la formule (((S/P)/P')/P'')P'''..., permet de prendre en compte l'histoire et l'évolution. S'ensuivent une série de rapprochements entre les chaînes sémiologiques barthésiennes, la tonation (Tönung) chez Uexküll, la sémiose chez Peirth, voire la physique chez Heisenberg. Il s'agira ici d'ordonner ces divers rapprochements en tant que production de la réalité (le milieu, Umwelt) à partir du Réel (l'environnement, Umgebung), et réciproquement.

mercredi 17 janvier 2018

Pour que naquît ce paysage / Augustin BERQUE

Calling on a Friend in the Snow (détail, Sun Zhi, 1595)
NdE. : à penser en rapport avec
"L'antre de la Femelle obscure" d'A. Berque
source
Paru dans Œuvre et lieu, sous la direction d'Anne-Marie Charbonneaux et Norbert Hillaire en collaboration avec Annie Delay, Paris, Flammarion, 2002, p. 18-34. (c) avec l'aimable autorisation des éditions Flammarion, pour diffusion scientifique. 

Pour que naquît ce paysage

par Augustin BERQUE


I. Pour que naquît ce paysage, il avait fallu bien du temps : le long travail d'une histoire, lentement tissée entre la montagne et les cals de mains humaines, sous des ciels changeants ; mais là-devant, je n'ai passé que deux journées d'automne, saison propice aux imparfaits du subjonctif. C'était en octobre, la fête était passée (du moins, j'en avais la trace écrite), et dans quelques semaines, tout cela serait recouvert par la neige. Par beaucoup de neige : dans la cour de l'ancienne école de Tsuchikura, la perche du nivomètre était graduée jusqu'à plus de quatre mètres. Encore cette école, qui par manque d'enfants dut être fermée en Heisei VIII (1996), n'était-elle qu'une annexe utilisée l'hiver ; l'école principale, celle de la belle saison, n'étant alors plus dégagée par le chasse-neige. Un refuge, en somme, avec un beau grand poêle dans la salle de gymnastique. 

mercredi 3 janvier 2018

Les limites radicales de la subjectité / Augustin Berque

L’araignée qui pleure (Odilon Redon, 1881)
source
À paraître dans Method(e)s. African Review of Social Sciences Methodology, 2017 : Fractures épistémologiques dans un monde globalisé.

Les limites radicales de la subjectité occidentale moderne

– quelques implications épistémologiques de la mésologie –

Augustin Berque

Résumé – On distingue d'abord ici la subjectité de la subjectivité. La subjectité est proprioceptive: c'est avoir une certaine conscience de soi, donc être un sujet, pas un objet. La subjectivité est un attribut de la subjectité : c'est voir les choses de son propre point de vue. Le mécanicisme occidental moderne a dénié la qualité de sujet aux vivants non-humains, voire à certains humains. Au contraire, la mésologie (l’Umweltlehre d’Uexküll) pose que tout être vivant est un sujet, qui de ce fait a son propre monde. On creuse ici la question des degrés et des champs de cette subjectité, du vivant le plus primitif au "moi je" du sujet occidental moderne.

Plan : §1. Quelques mots du sujet ; §2. Le paradigme mécanique ; §3. Le tournant uexküllien ; §4. Une science du de-soi-même-ainsi (shizengaku 自然学) ? ; §5. Le vif du sujet ; §6. Des concepts et, pourquoi pas, un autre paradigme ?