mercredi 11 décembre 2013

Marcher au Japon / A. Berque

Kyôto-shi Rakusai Chikurin kôen
Kyôto-shi Rakusai Chikurin kôen
Augustin Berque (CC)
École spéciale d’architecture, Paris, le 10 octobre 2013
Cycle de conférences de l’automne 2013 : La marche

Marcher au Japon

 Par Augustin BERQUE


1. Le chemin du Bois de bambous 

L’image ci-contre, que l’on a choisie pour l’affiche annonçant cette conférence, est une photographie que j’ai prise il y a quelques années au parc du Bois de bambous de Kyôto (Kyôto-shi Rakusai Chikurin kôen 京都市洛西竹林公園). C’est un parc où sont rassemblées une grande variété d’espèces de bambous, de tailles et de formes parfois surprenantes. Le diamètre des plus gros bambous atteint une quinzaine de centimètres, et ils peuvent dépasser les vingt mètres de hauteur. C’est le cas de l’espèce qu’on appelle au Japon madake 真竹 (Phyllostachys[1] bambusoides), le « vrai bambou ». Ceux que vous voyez sur l’image sont d’une autre espèce, plus petite, le bambou de Budai (Hoteichiku 布袋竹, Phyllostachys aurea). Le bambou, notamment le madake, est une plante naturelle au Japon, mais que l’on cultive aussi parce qu’elle se prête à de très nombreux usages, y compris alimentaires (les « pousses de bambou », takenoko 竹の子). Au petit Musée du bambou qui est adjoint au parc, on apprend même que dans les dernières années de la guerre du Pacifique, par manque de métal, on avait mis au point du béton armé par des tiges de bambou !

mercredi 4 décembre 2013

Le territoire des meisho / A. Berque

Pèlerins de la cascade Kirifuri du mont Kurokam Katsushika Hokusai
Pèlerins de la cascade Kirifuri du mont Kurokam
Katsushika Hokusai, 1831-32
source : Philadelphia Museum of Art
Paru dans  Les rameaux noués. Hommages offerts à Jacqueline Pigeot, sous la direction de Cécile SAKAI, Daniel STRUVE, TERADA Sumie et Michel VIEILLARD-BARON, Paris, Collège de France : Institut des hautes études japonaises, 2013, p. 23-36.

 Le territoire des meisho

par Augustin Berque

1. Michiyuki-bun
Rappelons d’abord les grandes lignes de Michiyuki-bun. Poétique de l’itinéraire dans la littérature du Japon ancien[1], la thèse fameuse qui valut à Jacqueline Pigeot le prix Yamagata Bantô, le plus prestigieux de la japonologie. C’est là que j’ai découvert la question des « lieux renommés », les meisho 名所.
            Le mot michiyuki-bun 道行文, qui signifie « littérature (bun) d’itinéraire (michiyuki) », a été créé par la philologie moderne pour désigner un type de littérature qui se développa au XIIIe siècle et connut une grande faveur à l’époque Muromachi (XIVe – XVIe siècles).  Il s’agit de la relation de voyages fictifs dans des lieux connus, dont le style se caractérise par une prose rythmée (surtout des heptamètres et des pentamètres alternés), évoquant la nostalgie du voyageur, riches en toponymes et en citations de poèmes anciens, et mettant systématiquement en œuvre des tropes appelés engo 縁語 et kakekotoba 掛詞.

mercredi 27 novembre 2013

Secret / C. Plouviet

Narcisse Le Caravage
Narcisse, Le Caravage (v. 1595)
source
COMPTE RENDU DU SEMINAIRE DU VENDREDI 21 NOVEMBRE 2013

Secret

C. Plouviet

La séance a été consacrée à une présentation éclectique des différentes manières de ne pas exclure le tiers.

La recherche d'un dénominateur commun aux sciences ("dures" et "humaines") et aux arts est au centre de l'attention de Claude Plouviet. En distinguant "phénomènes relationnels" et "interactions identitaires", M. Plouviet recense un vaste panel théorique et artistique des alternatives au TOM (Topos Ontologique Moderne).

Les auteurs et les références sont nombreux, de Stéphane Lupasco à Magritte, du deuxième principe de la thermodynamique à la linguistique de Ferdinand de Saussure, de la mésologie berquienne aux travaux de Jean-Marie Lehn, etc. Nous mettons en ligne le (long) texte qu'il nous a transmis (102p.) ainsi que le fichier ppt qui accompagnait son exposé. 

mercredi 13 novembre 2013

CR séminaire du 08 novembre 2013 / A. Berque, Y. Moreau

Ceci n'est pas la Terre Mission Apollo-Saturn 8 (W. A. Anders, 1968)
Ceci n'est pas la Terre
Source : Mission Apollo-Saturn 8 (W. A. Anders, 1968)
  The Museum of Fine Arts, Houston

Séminaire EHESS "Mésologiques"

Compte rendu de la séance du vendredi 8 novembre 2013

A. Berque


I. Mésologie et poétique des images (Yoann Moreau)
La séance commence par un exposé de Yoann Moreau, docteur de l'EHESS, sur le test de Rorschach (et d'autres documents iconographiques) comme illustration de la formule de base de la relation mésologique : r = S/P, ce qui se lit : "la réalité r, c'est le sujet S en tant que prédicat P". Dans cette relation, S (le sujet du logicien, i.e. l'objet du physicien) est ce dont il s'agit ;  P est la manière dont on le saisit par les sens, par l'action, par la pensée et par la parole. Ce quatrième mode de saisie est propre à l'humain, et le troisième à une partie seulement des êtres vivants ; mais les deux premiers modes concernent la totalité du vivant. Cette saisie est donc plus qu'une prédication, opération seulement verbale; elle concerne tous les aspects de la réalité. C'est une trajection.

Mésologie et poétique des images / Y. Moreau

Hermann Rorschach
Mésologie et poétique des images

Yoann Moreau




Que voyez-vous ?
Que voyons nous ?


Cette tache fait partie d’une série de dix taches constitutives du test psychologique proposé par Hermann Rorschach (1884-1922) en 1921. Ce test opère en proposant à l'interprétant d'énoncer ce que lui évoque une tache fabriquée par pliage d'une feuille contenant une encre liquide.

Puisque l'on ne peut prétendre avoir voulu représenter quelque chose de spécifique au moyen de cette technique, toute évocation est plausible et aucune ne peut revendiquer énoncer la réalité de ce qui est représenté. Le sujet soumis au test énonce donc sa posture même d'interprétant : il lit une tache en tant que (quelque chose), faisant chose de ce qui - a priori - n'a ni fonction, ni figure, ni signification.

La mésologie, pourquoi et pour quoi faire ? / A. Berque

Young Ladies Planting Rice Kawai Gyokudō
Young Ladies Planting Rice (Kawai Gyokudō, 1945)
source : Yamatane Museum of Art
P o u r – q u o i
– Cycle de conférences à l’Université de Nanterre –

La mésologie, pourquoi et pour quoi faire ?

Conférence du mercredi 4 décembre 2013
par Augustin Berque

1. L’incompréhension première
Le premier contact que j’ai eu avec la mésologie, ce fut sans le savoir. C’était un jour d’août 1969, à Tokyo, où je me trouvais depuis peu. J’y étais venu avec l’intention de préparer ma thèse au Japon, une thèse de géographie régionale ; et ce jour-là, je rendais visite à un professeur auquel mes maîtres français m’avaient recommandé, le géographe Kobori Iwao[1], pour lui demander conseil à propos du choix de mon sujet. Il parlait français, ce qui valait mieux parce qu’à ce moment-là, je m’exprimais encore très mal en japonais. Au moment de nous séparer, il me prêta un livre qui, me dit-il, m’aiderait mieux que tout autre à comprendre le Japon. Comme je le préciserai tout à l’heure, ce livre est l’un des deux grands classiques de la mésologie. Quarante ans plus tard, je l’ai traduit en français ; vous pouvez donc le lire, c’est Fûdo. Le milieu humain, de Watsuji Tetsurô[2].

mercredi 6 novembre 2013

Les arbres peuvent-ils mentir ? / A. Berque

Beech Grove Gustav Klimt
Beech Grove (Gustav Klimt, 1902)
Gemaldegalerie Neue Meister, Dresden, German
(source)
Paru dans Bûch’zine n° 4, numéro spécial sur les parquets de faux-bois, automne 2013, p. 5-8.

Les arbres peuvent-ils mentir ?

par Augustin Berque

            Les faux parquets, à l’origine, furent découpés sans doute par de faux parqueteurs dans de fausses planches, issues elles-mêmes de fausses billes tronçonnées dans de faux arbres. De fil en aiguille, on imagine des forêts de faux, comme il y en a effectivement aux environs de Reims, ville de Champagne voisine de Verzy. Ces faux-là, cependant, sont de vrais hêtres, et même de vrais êtres botaniques, ce qui leur vaut le nom de Fagus sylvatica var. tortuosa. Ils ne sont faux du reste que la moitié du temps, à savoir au pluriel, car au singulier on écrit « fau », ce que nul ne confondrait avec une faux, instrument aratoire, et encore moins avec l’adjectif faux, fausse, lequel, en revanche, peut s’appliquer de nos jours aux parquets. Or on ne peut pas faire de parquets avec un fau, c’est un arbre trop tortueux (c’est pourquoi on l’appelle aussi tortillard) : une fois il vous dit « OK ! », et la fois d’après « Basta ! ».

lundi 4 novembre 2013

Mésologiques : philosophie des milieux / A. Berque, Y. Moreau

Cette semaine, première séance du séminaire

"Mésologiques : philosophie des milieux"

(A. Berque, L. Boi)
Vendredi 8 novembre, 18h-20h
Salle Lombard, 96 bd Raspail

mercredi 30 octobre 2013

Qu’est-ce que le monde pour la mésologie ? / A. Berque

Échappée devant la critique Père Borrell del Caso
Échappée devant la critique
(Père Borrell del Caso, 1874)
(source)
Université de Neufchâtel, Maison d’analyse des processus sociaux.
Cycle de conférences Repenser le monde, et vite !

Qu’est-ce que le monde
pour la mésologie ?

Conférence
Augustin BERQUE
29 octobre 2013

Résumé Si le terme même de "mésologie" est dû à un médecin positiviste (Charles Robin, disciple d'Auguste Comte, qui le créa en 1848), la mésologie au sens actuel a hérité d'Uexküll et de Watsuji une vision phénoménologique, reposant sur la distinction entre l'environnement comme donné objectif (Umgebung) et le milieu comme monde ambiant (Umwelt) propre à un certain être (individu, société, espèce). La réalité concrète relève du milieu, non de l'environnement dont Uexküll a prouvé que les objets, comme tels, n'existent pas pour l'animal. Nous devons repenser, et vite, la réalité sur ces bases.

mercredi 23 octobre 2013

Renaturer la culture, reculturer la nature, par l’histoire / A. Berque

Test de Rorschach planche 3
Test de Rorschach, planche 3.
À paraître dans Entropia, numéro spécial « L’histoire désorientée », octobre 2013.

Renaturer la culture, reculturer la nature, par l’histoire

Augustin Berque

1. Au delà de Wittgenstein ?


« Renaturer la culture, reculturer la nature » : cette formule d’inspiration marxienne – elle descend d’un thème des Manuscrits de 1844 : « Naturalisierung des Menschen, Humanisierung der Natur » (naturalisation de l’humain, humanisation de la nature) –, je l’ai déjà invoquée voici une quinzaine d’années au début d’un livre où je tentais de poser les principes d’une mésologie, partant de l’idée que la relation des sociétés humaines à l’étendue terrestre s’établit et fonctionne d’une manière que la dichotomie classique entre le subjectif et l’objectif ne permet pas de saisir[1].

mercredi 16 octobre 2013

De l'acte artistique à un milieu humain / A. Berque

Mother and Child Fritz Stuckenberg
Mother and Child, Fritz Stuckenberg (1920)
source
Symposium international
Développement humain et milieu de vie
Quels partenariats Université/Monde associatif à travers l’acte artistique ?
Armentières / Le Favril, 11-13 octobre 2013

De l’acte artistique à un milieu humain

par Augustin BERQUE

 

1. Le litige entre terre et monde

 

Beaucoup d’entre nous avons en mémoire au moins le titre d’un texte fameux de Heidegger, L’origine de l’œuvre d’art (Der Ursprung des Kunstwerkes, 1935-1936). Il y est question d’un « litige » (Streit) obscur entre la terre et le monde, à propos duquel Heidegger écrit ceci :

Ce vers où l'œuvre se retire, et ce qu'elle fait ressortir par ce retrait, nous l'avons nommé la terre. Elle est ce qui, ressortant, reprend en son sein (das Hervorkommende-Bergende). La terre est l'afflux infatigué et inlassable de ce qui est là pour rien. Sur la terre et en elle, l'homme historial fonde son séjour dans le monde. Installant un monde, l'œuvre fait venir la terre (Indem das Werk eine Welt aufstellt, stellt es die Erde her). Ce faire-venir doit être pensé en un sens rigoureux. L'œuvre porte et maintient la terre elle-même dans l'ouvert d'un monde. L'œuvre libère la terre pour qu'elle soit une terre[1].

mercredi 2 octobre 2013

L'invention du paysage en Chine / A. Berque

Landscape Chen Zizhuang
Landscape, Chen Zizhuang (1913-1976)
source
Paru dans Libération, 4 octobre 2013, dossier FIG Chine

L’invention du paysage en Chine

par Augustin Berque

Le paysage, ne suffit-il pas d’ouvrir les yeux pour en voir ? Et pourtant, chose étrange, ce mot n’a pas toujours existé. En Europe, il ne date que de la Renaissance. La question a beaucoup préoccupé les sciences humaines voici une trentaine d’années, à l’époque où l’on commençait à s’intéresser sérieusement à cette question parce que l’on se rendait enfin compte des ravages que la civilisation moderne inflige aux paysages. On a donc alors découvert que « le paysage » n’avait pas toujours existé.

mercredi 18 septembre 2013

A en tant que Ā : le syllemme de la réalité / A. Berque

Evolution (early 21st century) par Latika Katt
Evolution (early 21st century) par Latika Katt
National Gallery Of Modern Art (NGMA), New Delhi
(source)
Colloque philosophique franco-japonais
Université Dôshisha, Kyôto, 13-14 décembre 2013
A en tant que Ā : le syllemme de la réalité
ĀとしてのA : 現実に於ける即の論理
par Augustin BERQUE

Résumé – Créée en 1848 comme science positive des milieux par un disciple d’Auguste Comte, Charles Robin, mais plus tard écartelée entre sciences de la nature et sciences humaines, la mésologie (環世界学、風土学) s’est étiolée devant l’écologie et a presque disparu au XXe siècle, avant de renaître sous le nom d’Umweltlehre (環世界学) dans les travaux d’Uexküll, et de fûdogaku 風土学dans ceux de Watsuji. Différence radicale avec la mésologie de Robin, celle-ci est une herméneutique dont la condition est la subjectité (主体性) du vivant en général, ou de l’humain en particulier. Le milieu n’est donc pas l’environnement objectif que considère la science écologique ; mais ce n’est pas non plus une simple représentation subjective, parce qu’il existe réellement.  À la fois subjectif et objectif, A et Ā (non-A), il est trajectif (通態的).

mardi 10 septembre 2013

Puissance des formes, être des lieux / A. Berque

Trois racines, Saint-Cloud (1906) par Eugène Atge
Trois racines, Saint-Cloud (1906)
par Eugène Atget, Musée J. Paul Getty
(source)
Conférence à Cantercel (sens-espace@cantercel.org) le jeudi 18 juillet 2013

Puissance des formes, être des lieux : l’organicité des milieux humains

par Augustin Berque

            L’organique a un rapport avec la vie (en anglais organic farming correspond à notre « agriculture bio »). L’idée d’organicité en architecture s’opposera donc au fonctionnalisme mécaniste né du dualisme moderne. Il ne s’agit pas de retomber dans un animisme prémoderne ou dans un vitalisme ascientifique, mais de comprendre que les formes qui nous entourent, celles de notre milieu, ont un rapport intime avec notre vie. Commençons par ne pas confondre « milieu » (Umwelt, chez Uexküll), ce qui suppose l’existence d’un sujet individuel ou collectif, humain ou non-humain, et « environnement » (Umgebung), ce qui est un simple donné objectifié du « point de vue de nulle part » que s’est donné la science. La mésologie, étude des milieux, n’est pas l’écologie, étude de l’environnement.

mercredi 4 septembre 2013

La puissance des formes / A. Berque

Chair, Carlo Bugatti
Chair, Carlo Bugatti (1902)
Musée d’Orsay, Paris
(source)
Colloque Les sciences des formes. Villa Arson, Nice, 8-10 avril 2013

La puissance des formes

par Augustin BERQUE


Résumé – Dans un milieu vivant, et a fortiori dans un milieu humain, la forme d'une chose n'est jamais réductible au contour d'un objet, contrairement au dogme géométrique abstrait que nous devons à la révolution scientifique du XVIIe siècle et à la topo-logique aristotélicienne, qui préfigure l'objet moderne avec l'idée que la chose est exactement délimitée par son topos, tout en étant séparable de celui-ci. La réalité d'une chose, et donc sa forme, se définit dans un tissu relationnel mouvant, qui engage concrètement le sujet comme l'objet, et où cette chose ek-siste nécessairement au delà de son contour matériel. Son être ne s'arrête pas à cette limite, il est toujours en devenir (genesis) dans un certain milieu, comme Platon l'avait pressenti avec la notion de chôra, et comme Heidegger le souligna en posant qu'au contraire, sein Wesen beginnt (son être commence) à partir de cette limite, au lieu de s'y borner. On rapproche ces façons de voir de certaines notions propres à l'Asie orientale, telles que "le grand symbole n'a pas de forme" (da xiang wu xing大象無形) en Chine, ou que les "biens culturels sans forme matérielle" (mukei bunkazai 無形文化財) au Japon.

mercredi 28 août 2013

De milieu en art / A. Berque

Pépin de raisin en bronze sur ceps de vigne Didier Rousseau-Navarre
Pépin de raisin en bronze sur ceps de vigne
Didier Rousseau-Navarre, 2013
Courtoisie de l'auteur (cc)
Conférence d’ouverture à l’exposition de Didier Rousseau-Navarre Mésologiques 22 août – 22 septembre 2013
Centre d’art CAMAC, Marnay-sur-Seine http://camac.org

La mésologie, de milieu en art

A. Berque


1. Qu’est-ce que la mésologie ?


Le mot mésologie vient du grec mesos, « au milieu, médian », et logia, « théorie », de logos, « discours ». Cela veut donc dire « théorie des milieux ». Comme le rapporte le philosophe des sciences Georges Canguilhem (1904-1995), ce mot a été publiquement proposé le 7 juin 1848, à la séance inaugurale de la Société de biologie, par un jeune médecin disciple d’Auguste Comte, Charles Robin (1821-1885) :

mardi 13 août 2013

Le mot « paysage » évolue-t-il ? / A. Berque

Thinking through landscape
A. Berque
Routledge , 2013
source
24/7/13. À paraître dans Manzar.

Le mot « paysage » évolue-t-il ?



Augustin Berque

            Lorsque le DEA Jardins, paysage, territoires (« DEA Paysage ») fut fondé par Bernard Lassus, en 1991, à l’École d’architecture de Paris-La Villette, il se distingua notamment par l’idée que le paysage n’est pas l’environnement. Autrement dit, le paysage ne relève pas de l’écologie. Alors, comment peut-il exister une écologie du paysage ? Et y a-t-il, oui ou non, « paysage » dans toutes les cultures ? À l’époque, le débat était assez confus, mais une génération a passé depuis. Peut-on aujourd’hui cadrer plus fermement la question ?

mercredi 7 août 2013

Dualité du jinja : coexistence de la cabane et du rocher / I. Sahban

Seascape Utagawa Kunisada
Seascape, Utagawa Kunisada (1786 - 1865)
source

Dualité du jinja : 
coexistence de la cabane et du rocher

par Ilham SAHBAN

A Kyoto, dans le quartier Uzumasa太秦 sur l’avenue Taishi-michi太子道, un grand portique torii 鳥居 en bois non peint, précédé de deux lanternes de part et d’autre, invite à pénétrer dans l’aire sacrée du sanctuaire Konojima 木ノ嶋神社. Un petit pont enjambe un canal, et permet de s’engager sur le sandō 参道, chemin menant au pavillon principal. Sur la gauche, deux torii précédés de deux statues de renards gardiens montrent la voie vers de petits sanctuaires annexes.

mercredi 31 juillet 2013

Peut-on dépasser l’acosmie de la modernité ? / A. Berque

Self portrait at an early age Rembrandt
Self portrait at an early age
(Rembrandt, 1628-1629)
source
Université de Corse, Corte, 11 juin 2013 / Séminaire Questions de mésologie, VII

Peut-on dépasser l’acosmie de la modernité ?

par Augustin Berque


§ 1.  Terre, monde, cosmos, univers
            Un ouvrage récent d’Henri Raynal est intitulé Ils ont décidé que l’univers ne les concernait pas[1]L’auteur y emploie le terme d’acosmisme pour dénoncer l’« autisme » de notre espèce, qui s’estime aujourd’hui dégagée de toute obligation de penser sa place dans l’univers, et de s’y tenir. Pour dire des choses assez voisines, je préfère employer le terme d’acosmie, qui a pour moi l’avantage d’évoquer l’anomie durkheimienne, c’est-à-dire l’effacement des valeurs, et les désordres qui s’ensuivent. Alors toutefois que l’anomie est sociale, l’acosmie concerne à la fois le social et le naturel.  Plus exactement, il s’agit de l’embrayage des valeurs humaines aux faits de la nature, auxquels la mésologie, contrairement au naturalisme (tels la sociobiologie ou Calliclès dans le Gorgias)[2], refuse de les réduire, mais aussi, contrairement au métabasisme contemporain (tel celui de la French theory, laquelle nous verrait volontiers planer dans l’azur sans plus de base terrestre), tient tout autant à les y fonder.

mercredi 19 juin 2013

La science économique, une science « hors-sol » / Marie-Antoinette Maupertuis

La boîte de Pandore René Magritte
La boîte de Pandore, René Magritte (1951)
(Yale University Art Gallery)
Séminaire EHESS, 17 Mai 2013

La science économique, une science « hors-sol »[1] ?

Par Marie-Antoinette Maupertuis


I. La science économique, une science auto-centrée

 

Pour introduire mon propos, je souhaiterais rappeler en quoi la science économique est une science auto-centrée. La science économique n’entretient que peu, voire pas de lien explicite, avec la mésologie i.e. l’étude des milieux humains. Ceci n’est guère surprenant.


mercredi 29 mai 2013

La mondialisation a-t-elle une base ? / A. Berque

Chant of Universe Bang Hai Ja
Chant of Universe, Bang, Hai Ja (1975)
(source)
Paru dans Guy MERCIER, Les territoires de la mondialisation, Québec, Presses de l'Université Laval, 2004, p. 73-91. Table ronde Les territoires de la mondialisation . Salon international du livre, Québec, 25 avril 2002 

La mondialisation a-t-elle une base ? 

par Augustin BERQUE


1. Monde n'est plus univers, ni cité humaine


Seraient-ils les plus rebattus, les mots ont toujours des profondeurs insoupçonnées ; c'est à nous d'aller y voir, en commençant par les dictionnaires. Ainsi l'édition 2001 du Petit Larousse illustré définit-elle mondialisation comme « Fait de devenir mondial, de se mondialiser ; globalisation » ; et mondial comme « ce qui concerne le monde entier » . Fort bien ; mais alors, qu'est-ce donc que le monde ?

mercredi 22 mai 2013

Le déploiement des formes / A. Berque

Le rêve de l'architecte Thomas Cole
Le rêve de l'architecte, Thomas Cole (1840)
(source)
Colloque international Les territoires du temps.
Société française des architectes, 24 et 25 mai 2013.
A paraître dans Le Visiteur.

Le déploiement des formes, architecturales entre autres 

par Augustin BERQUE

§ 1. L’exposition MA – espace-temps au Japon
  
« Au Japon, les notions de temps et d'espace sont unies dans un seul concept traduit par le mot "MA" (…) Il n'existe aucune différence entre les deux notions de temps et d'espace telles que les perçoivent les Européens. (…) Ce concept est le fondement même de l'environnement, de la création artistique et de la vie quotidienne au point que l'architecture, l'art, la musique, le théâtre, l'art des jardins sont tous appelés des arts "MA" ». L’annonce de l’exposition n’y allait pas par quatre chemins…

mercredi 1 mai 2013

Sujet et paysage / A. Berque


Der Wanderer über den Nebelmeer Caspar David Friedrich
Der Wanderer über den Nebelmeer, 1816,
Caspar David Friedrich
(source)
Colloque international « Paysage et imagination » 

École nationale supérieure d’architecture de Paris-La Villette, 2-4 mai 2013 

De la constitution du sujet dans le paysage

Augustin Berque

1. Au-dessus de la mer de nuages ?


Le tableau célèbre de Caspar David Friedrich, Le Voyageur au-dessus de la mer de nuages (Der Wanderer über den Nebelmeer, 1816, Hamburger Kunsthalle) nous laissera toujours à imaginer quel personnage se trouve là, et à quoi il pense. La mer de nuages, est-ce l’objet de son regard, ou son regard lui-même ? Et ce regard, ne serait-ce pas le nôtre ? Ni la langue française, ni d’ailleurs aucune langue européenne, ne nous aide ici à répondre. Le « sujet », ce peut être la scène que peint le tableau, ou le personnage qui regarde cette scène, ou encore nous-mêmes, à travers ce personnage. Faut-il vraiment, peut-on même ici distinguer un « sujet » d’un « objet » ? Le tableau, certes, forme une unité, mais cette unité se limite-t-elle à son contour ? Ou bien l’outrepasse-t-elle, nous emportant nous aussi au-dessus de la mer de nuages ? Mais alors, quel serait le lieu de ce sujet qui serait aussi l’objet – le spectateur et la mer de nuages ?

mercredi 24 avril 2013

Humaniser et naturaliser / A. Berque

Quatre saisons, une tête, Arcimboldo
Quatre saisons, une tête, Arcimboldo (1590)
(source)
Institut d’études avancées de Nantes. Conférence, mardi 16 avril 2013
Humaniser la nature, naturaliser l’humain aujourd’hui
par Augustin Berque

Résumé


Cette formule d’inspiration marxienne [0] veut exprimer une triple urgence. Celle, d’abord, de recosmiser notre existence ; car l’exaltation du sujet individuel moderne a entraîné une décosmisation qui à terme est mortelle, aucun être ne pouvant vivre sans un monde commun (kosmos). Celle, ensuite, de reconcrétiser les mots et les choses, en les remettant dans le fil de leur histoire commune (leur croître-ensemble : concrescence) ; car l’arrêt sur objet propre à la modernité aboutit à dépouiller les choses de leur sens, faisant notamment du langage une aporie. Enfin, celle de réembrayer nature et culture, en passant nécessairement par la question du rapport entre histoire et subjectivité, ce à tous les degrés de l’être, allant, par l’évolution, de la vie la plus primitive jusqu’à la conscience la plus humaine. Recosmiser, reconcrétiser, réembrayer : devant ces trois urgences, la pensée occidentale est aujourd’hui plombée par ce qui hier a fait sa force : la structure mère sujet-verbe-complément, qui à partir de la langue a orienté notre logique (avec le modèle sujet-prédicat), notre métaphysique (avec l’identité de l’être) et, de là, notre science (avec l’en-soi de l’objet), toutes fondées sur le double principe d’identité et de tiers exclu, c’est-à-dire sur la forclusion du symbolique. Des exemples tels que la langue japonaise, dont la structure mère était d’un autre genre, ou que le tétralemme développé par les penseurs indiens, qui inclut systématiquement le tiers, nous suggèrent la voie qui nous permettra de dépasser les apories de la modernité.

mercredi 17 avril 2013

La notion de chose en droit / S. Vanuxem

Le jugement de Pâris Peter Paul Rubens
Le jugement de Pâris (1632-5) Peter Paul Rubens
(source)
Séminaire Mésologique, 12 avril 2013

Pour une approche mésologique de la notion de chose en droit [1]

Sarah Vanuxem 

maître de conférences à l’Université de Nice Sophia Antipolis 
(GREDEG – CREDECO)

A la question « Qu’est-ce qu’une chose ? » le juriste contemporain apporte cette réponse : le terme « chose » signifie les « biens matériels qui existent indépendamment du sujet, dont ils sont un objet de désir, et qui ne ressortissent pas exclusivement au monde juridique (par opposition aux droits) ». Fournie par un usuel – la dernière édition du Lexique des termes juridiques[2] – cette définition est emblématique de la manière dont les juristes se représentent les choses : les choses sont des biens, soit des choses appropriées ou, du moins, susceptibles d’appropriation. Pour autant, les choses ne sont pas tous les biens, mais une espèce seulement de biens : ce sont les biens matériels et, plus précisément, des res corporales, lesquelles n’existent pas seulement en Droit, à l’inverse des droits ou res incorporales, qui n’ont pas d’existence en dehors du Droit et n’existent que par lui. Tandis que les choses ou res corporales ressortissent au donné, les droits ou res incorporels ressortissent au construit. En outre, les choses apparaissent extérieures aux sujets de droit ou personnes.  Les choses ne sont rien d’autre, affirme-t-on sans détour, que des objets de désir, et partant, peut-on imaginer, des matériaux corvéables à merci. Ainsi, les choses apparaissent délibérément opposées aux personnes : ce sont des objets par opposition aux sujets, de simples moyens pour ces fins.

mercredi 10 avril 2013

Développement des territoires et innovation : questions de mésologie / Univ. Di Corsica

Corsica William Turner
Corsica, William Turner (1830-1835)
(source)

Développement des territoires et innovation : questions de mésologie

Augustin Berque

La chaire "Développement des territoires et innovation : questions de mésologie" créée en 2012 à Corte par la Fundazione di l'Università di Corsica en collaboration avec l'Université de Corse et le CNRS (UMR LISA) a tenu sa session de printemps sur le thème du paysage et du sacré dans la nature, avec notamment un film de Jean Froment sur la Corse (série prochainement programmée sur Arte), deux leçons d'Augustin Berque (fichiers ci-joints), et un exposé de Laetitia Carlotti, plasticienne ouvrier du paysage.
Le détail des activités de la chaire, la captation vidéo de la session et des sessions précédentes, ainsi que les textes des leçons d'A. Berque, sont accessibles sur le site de la Fondation : fundazione.univ-corse.fr

Textes associés, à lire en ligne ci-après: "Mésologie du sacré" (version révisée) et "Des eaux de la montagne au paysage". 

mercredi 3 avril 2013

Sujet, sens et milieu : la trajection du physique au sémantique

L'alchimiste Cornelis Bega
L'alchimiste (1663) Cornelis Bega
(source)
Séminaire Mésologiques, EHESS. Vendredi 22 mars 2013

Sujet, sens et milieu

la trajection du physique au sémantique

Exposé d’Augustin BERQUE
Un texte complémentaire (à lire en premier, pour les personnes non familières de la mésologie)  "Sujet, fûdo, mésologie".

Sens, milieu, subjectité

            La problématique des milieux commence avec le mot sens. Dans la perspective de la mésologie[1], ce mot est pleinement assumé dans sa triple et conjointe acception de direction spatio-temporelle, capacité de sensation charnelle et signification mentale. Le premier aspect relève du niveau ontologique de la planète : c’est le sens dans lequel vont physiquement les choses, à la fois dans l’espace et dans le temps. Le second, de celui de la biosphère : c’est la capacité de sentir qu’ont les êtres vivants, et les organes qui y correspondent. Quant au troisième, il relève de l’écoumène : le niveau ontologique de l’existence humaine, où les choses, notamment grâce au langage, prennent une signification qu’élaborent et transmettent nos systèmes symboliques et techniques. Et de même que l’écoumène présuppose la biosphère, qui présuppose la planète (non l’inverse), de même la troisième strate du sens présuppose la seconde, qui présuppose la première (non l’inverse)[2].

mercredi 20 mars 2013

Natura natura semper / A. Berque

Mt. Ktaadn Frederic Edwin Churck
Mt. Ktaadn, Frederic Edwin Churck (1853)
(Yale University Art Gallery)
Colloque La naturalité en mouvement : environnement et usages récréatifs de la nature. Domaine Olivier de Serres, Le Pradel, 20-22 mars 2013

Natura natura semper

(la nature sera toujours à naître)

– un point de vue mésologique –

par Augustin Berque

§ 1. Depuis quand « la nature » existe-t-elle ?

La nature, en principe, existe depuis que le monde existe. La tradition chrétienne nous a laissé penser que celui-ci fut créé par un être absolu, Dieu, à un certain moment. Quand cela ? Selon les calculs effectués en 1654 sur la base des Écritures par John Lightfoot, vice-chancelier de l’Université de Cambridge, ce fut le septième jour, le 26 octobre 4004 avant Jésus-Christ à neuf heures du matin, que Dieu couronna la Création en créant l’Homme ; après quoi, il se reposa[1]. La nature existerait donc depuis une semaine avant cette date. La science moderne, après de durs combats contre l’Église, a reculé celle-ci de 13,7 milliards d’années, plus ou moins 700 millions ; mais cela ne change pas le principe : la nature existe depuis qu’existe l’univers. C’est l’idée commune à la science et à l’opinion ordinaire.

mercredi 20 février 2013

La biodiversité et l'ordre moral / A. Berque

Paysage paradisiaque avec des animaux Jan Breughel II
 Paysage paradisiaque avec des animaux, Jan Breughel II (1613 - 1615)
(source)
Centro internazionale di studi interculturali di semiotica e morfologia. Università di Urbino, I giorni della biodiversità, 15 dicembre 2010

La biodiversité comme impératif moral

– de l’histoire naturelle à une histoire humaine –

par Augustin BERQUE
 
Résumé - À partir d'une réflexion sur les analogies que présentent la théorie des milieux humains chez WATSUJI Tetsurô et celle des milieux animaux chez Jacob von UEXKÜLL, on présente l'hypothèse d'une contingence exponentielle inhérente à l'histoire naturelle comme à l'histoire humaine, et dont l'effet concret a été d’un côté une diversité toujours plus grande (sauf extinction massive), tant des espèces vivantes que des cultures humaines, et de l’autre côté une interrelation structurelle entre l’existence de tout sujet (individu, société, espèce) et celle de son milieu propre, ainsi chargé de toutes les valeurs existentielles de ce sujet ; en particulier, pour l’humain, de ses valeurs morales. Le mécanicisme du paradigme occidental moderne-classique a engendré une tendance inverse, toujours plus accentuée, qui aujourd'hui atteint l'allure d'une extinction massive sous ces deux aspects : d’un côté, ravage de la diversité des espèces vivantes et des cultures humaines ; de l’autre, neutralisation de toutes les valeurs au nom d’un objectivisme qui n’est, en fait, qu’une forclusion de la moitié de l’être (sa part existentielle). On se livre à quelques spéculations quant aux raisons de cette tendance et à la possibilité de la renverser pour retrouver le fil de la nature et de l'histoire, donc de la diversité, ce qui de ce point de vue est un impératif moral.

mercredi 13 février 2013

Vocabulaire : Mésologie / A. Berque

Flora and Fauna from the Miocene Cenozoic Period.  Evolution of Continental Life on Earth, José María Velasco
 Flora and Fauna from the Miocene Cenozoic Period.
Evolution of Continental Life on Earth
,
José María Velasco (1840 - 1912)
Pour le Vocabulaire de la mésologie

Mésologie

Par A. Berque

Du grec meson, milieu, et logos, discours, science. La mésologie, terme créé par le médecin Charles Robin (1821-1885), se définit comme l’étude des milieux*, humains en particulier. Georges Canguilhem, dans Études d’histoire et de philosophie des sciences concernant les vivants et la vie (Vrin, 1968, p. 71-72), éclaire son origine :
Dans le Système de Politique positive (1851) Comte nomme deux jeunes médecins qu’il donne pour ses disciples, les docteurs Segond et Robin. Ce sont là les deux fondateurs, en 1848, de la Société de Biologie (…). L’esprit qui animait les fondateurs de la Société était celui de la philosophie positive. Le 7 juin 1848, Robin lisait un mémoire Sur la direction que se sont proposée en se réunissant les membres fondateurs de la Société de biologie pour répondre au titre qu’ils ont choisi. Robin y exposait la classification comtienne des sciences, y traitait dans l’esprit du Cours des tâches de la biologie, au premier rang desquelles la constitution d’une étude des milieux, pour laquelle Robin inventait même le terme de mésologie.

mercredi 6 février 2013

Sur la Terre / A. Berque

The Cosmos Yi Hee Choung
 The Cosmos Yi, Hee Choung (2008)
(source)
La justice et la paix dans les Saintes Écritures et la pensée philosophique. Colloque international, Université Tunis El-Manar, 19-23 avril 2009

Sur la Terre

les fondements terrestres de l'éthique humaine 

par Augustin BERQUE

Résumé – Le besoin humain de vivre dans la justice et la paix n'est pas souvent, dans les représentations habituelles, relié à la nature. Celle-ci, en particulier dans la tradition occidentale, est au contraire invoquée pour expliquer (sinon même justifier, comme ce fut le cas du nazisme) l'injustice et la guerre : "L'homme est un loup pour l'homme" (Hobbes), "La raison du plus fort est toujours la meilleure" (La Fontaine), etc. Cette dépréciation de la nature a une longue histoire, qui tend – pour le meilleur comme pour le pire – à placer l'humain dans un registre irréductible à l'ordre naturel. Cette vision aboutit aujourd'hui à une décosmisation qui met en péril l'existence même de l'humanité sur la Terre. Il importe de refonder l'éthique sur la Terre, dans une onto-cosmologie dépassant le paradigme moderne.